jeudi 12 juin 2008

Du bon ou du mauvais côté

J'ai une fâcheuse tendance à trop me répandre. Ici, j'entends bien. Alors parfois, j'essaye de faire le moins long possible (no comment...), mais du coup, il manque plein de choses.

Mon billet de mercredi a eu quelques commentaires qui me donnent envie d'aller plus loin. D'autant que j'avais déjà dit à Véro qu'il y avait quelques petites choses que je voulais lui expliquer. Parce qu'un jour, elle disait dans un commentaire qu'elle avait peur des maladresses qu'elle pouvait commettre, en tant que Maman, envers celles qui ont des difficultés à l'être.

Je ne peux bien sûr pas répondre au nom de toutes celles pour qui ça ne marche pas comme ça devrait. D'abord parce que je ne suis pas à plaindre. Bien sûr, de ce côté là, il y a un peu de délai. Mais rien d'insurmontable. L'attente est dure, certes, mais l'espoir est bien là.
Et puis chaque femme a ses propres réactions, et je commence à savoir que mes réactions ne sont pas souvent tout à fait celles de la majorité, alors je me contente de parler pour moi.

Véro, tu parles d'être de l'autre côté. Ce n'est pas vrai. On n'est pas d'un côté ou de l'autre parce qu'on a des enfants, parce qu'on est fertile, ou parce qu'on n'en veut pas. On se bat assez contre toutes les façons de dresser les gens les uns contre les autres, ça serait quand même fou de nous opposer là dessus.

S'il y a des différences, elles sont ailleurs.
Il y a ceux qui ont souffert, et dont les yeux s'ouvrent aux malheurs des autres, même quand ces autres veulent le cacher. On ne va pas pour autant en vouloir aux autres qui n'ont pas souffert.

Il y a les gens profondément bons. Ceux là, qu'ils regardent plus loin que ce qu'on leur montre à voir ou non, et bien d'instinct, ils ne font pas mal aux autres.

Et il y a ceux qui ont souffert et qui sont bons. Il me semble que tu as eu ton lot d'horreurs, de déceptions, de tristesse. Et il me semble aussi, d'après tes mots, que ça ne t'empêche pas d'être une belle personne.
Alors n'aies pas peur de tes questions. Même quand elles touchent involontairement un point douloureux, ce que l'on ressent derrière tes questions fait qu'à aucun moment tu ne réveilles une douleur. Une question qui fait mal, si elle est posée avec douceur, gentillesse et un intérêt sincère, elle devient presque bénéfique.
Alors ne crois plus être une énorme gaffeuse. Je ne te connais pas assez pour l'affirmer si fort, mais Odile me semble être un bon baromètre pour dire que tu es celle que l'on croit découvrir à travers tes mots.

(là, il y a "Je ne suis pas de celles..." qui passe. Voudrais bien partager ma bande sonore, mais y a plein de choses qui merdouillent sur mon PC depuis l'orage d'hier. Faudra rattrapper ça dès demain.)

Pour le reste.
Mme Cornue. Voilà un parfait exemple de Maman que tout le monde imagine que les infertiles détestent. Parce qu'elle est tombée enceinte sans le vouloir, et qu'en l'apprenant, ça a été un petit moment de déroute. Parce que ce n'était vraiment pas prévu, et que ça chamboulait tout. Alors cette Mme Cornue, toute pleine de sa réelle bonté, me dit que personne ne devrait avoir à freiner son bonheur. Mais Mme Cornue, pourquoi crois-tu donc que j'ai lu ton histoire, pourquoi crois-tu que je continue à venir chaque jour chez toi ?
Crois-tu vraiment que ça soit le bonheur des autres qui fasse mal ?

C'est Armand qui m'a fourni la citation suivante :
"Ce n'est pas le malheur, c'est le bonheur, le bonheur insolent, il est vrai, qui conduit à l'aigreur et au sarcasme." (Emil Michel Cioran).

Et au final, elle résume tout.
Ton bonheur, Mme Cornue, même si aujourd'hui il est entâché d'une lourde déception, mais ce bonheur de vivre, ce bonheur de partager, ce bonheur de porter un enfant même si ce n'était pas prévu comme ça dans les plans, ce bonheur d'être tout simplement, c'est un joli bonheur. Pas un bonheur insolent.

Alors tu pourrais le hurler ton bonheur qu'il ne ferait que me réjouir encore plus fort pour toi. Ce n'est pas parce qu'une femme est fertile que je ne l'aime pas, ou qu'elle me fait ressentir un pincement. Sinon, j'aurais vite arreté de te lire. Et Véro aussi. Et toutes les autres mamans que je visite chaque jour.

Ce sont les bonheurs insolents qui m'écoeurent. Dis moi honnêtement. Aurais-tu réellement envoyé une photo d'échographie à une amie qui viendrait de faire une fausse couche ? Ou aurais-tu choisi une autre façon de lui annoncer ta grossesse ? Je connais déjà la réponse. Tellement elle est évidente. Et pour autant, ça n'aurait en rien entamé ton bonheur.
Mais tu n'es pas de celles qui ont le bonheur égoïste. C'est tout, et c'est comme ça.

J'avais aussi parlé de cette amie enceinte, qui répondait au mail de celle qui annonçait sa fausse couche (et accessoirement à tous les destinataires du mail originel) en lui disant "ça arrive, ce n'est pas grave, ça sera pour la prochaine fois". Tu aurais écrit ça toi ? Non. Et ça ne t'aurait pour autant pas empêché de vivre ton bonheur.

Bien sûr que tout le monde doit pouvoir hurler son bonheur jusqu'à s'en époumoner. Je suis la première à le revendiquer. Mais il y a une différence fondamentale entre un bonheur qu'on veut partager avec les autres, et un bonheur qu'on jette contre les autres.

Je ne sais pas trouver les bons mots, mais je suis sûre que tout le monde aura compris ce que je voulais dire cette fois.

Et puis sinon, tant pis pour vous, faudra que j'y revienne, encore ;-)

C'est "Lili" maintenant qui passe. Grosse pensée à celui qui se reconnaîtra ;-)

Bon dodo à mes compatriotes, bonne soirée à ceux qui sont un peu plus loin.
Je pense à vous.
Je suis bêtement émotive parfois. Mais comme je n'ai jamais pu changer ça, je fais avec. Et ce soir, ça me fait dire que vous me faites du bien. Et que ce sont des choses bien fortes que l'on vit en passant par ce monde là.
(Oh làlàlàlà, je me demande déjà ce qu'Armand va répondre à ça ;-) !)

14 commentaires:

Anonyme a dit…

Chère Caro,
Etant vieux, il y a plein de trucs que je ne peux pas manger.
Je me souviens d'un dîner à la suite d'une exposition scientifique.
A notre table, une douzaine de profs d'université, âgés pour la plupart, et donc censés connaître les bonnes manières.
Une invitée nous prie de ne pas demander de moules, ce plat qui lui est interdit va lui faire envie.
Trois personnes en ont commandées car c'était la spécialité du restaurant... Ont-elles eu raison? Je me le suis demandé.
J'ai quand même été heureux que personne ne connaisse mes handicaps digestifs...
Amitiés

Caro D a dit…

Ben... Elle est bizarre aussi cette personne qui va dans un resto de moules pour demander aux autres de ne pas en prendre !!!
Si c'était moi, soit je n'y serais pas allée, soit j'aurais fermé ma grande...bouche.
Comme toi en somme.
Cette personne est dotée d'une autre sorte d'égoïsme, et finalement, ceux qui ont pris des moules ont eu raison. Même si je sais que je n'aurais pas osé ;-)

On en revient toujours au même. Ce sont les égoïstes qui me donnent de l'acidité gastrique :-)

Bonne journée !

Anonyme a dit…

Tu as dit exactement ce que j'avais besoin d'entendre, merci Caro. Je crois comme toi qu'on peut tous vivre ensemble... tout dépend de la réserve qu'on choisit d'avoir sur certains sujets... sur la compréhension mutuelle... et sur l'amour qu'on se porte...Il est très beau ton billet, comme toujours... crois-moi, tu arrives bien à faire passer les messages... et les émotions aussi!!!
je t'embrasse fort!

Odile a dit…

Je suis enièrement d'accord avec ce que tu dis Caro !!! On ne va pas détester toutes les femmes fertiles qui nous entourent (sinon il faut que j'aille m'exiler au fin fond des bois en pleine montagne !!) ....tout le monde a droit au bonheur quel qu'il soit !!! Tout ce que je demande moi c'est un peu de délicatesse.....on n'aurait pas idée d'aller dire à quelqu'un qui est en fauteuil roulant "pfiou je viens de me taper un footing je suis crevé j'en peux plus de le faire tous les jours" non ça nous viendrait même pas à l'idée....alors si tout le monde réfléchissait un peu ça m'éviterait d'entendre de la part de futures mamans "oh j'en ais marre j'ai des nausées...ou pfiou j'ai encore grossi il est temps que ça s'arrête" !!! Pour ce qui est de Véro tu es dans le vrai caro c'est un petit bout de femme absolument géniale, elle sait écouter quand il faut, être là quand on besoin d'elle et venir vers toi si elle voit que t'es pas bien mais que tu n'en dis rien !! Je l'aime beaucoup ma p'tite Véro !!

Caro D a dit…

:) :) :)

Anonyme a dit…

Je comprends maintenant beaucoup mieux ce que tu voulais dire dans les précédents billets.

C'est toujours délicat ces questions-là...

Peut-être trop délicat pour moi... Mais je pense que je comprends :)

Sur ce, je repars sur la pointe des pieds...

Jacynthe a dit…

Très beau billet qui explique bien des choses Merci

Caro D a dit…

@ Noisette : suis bien contente si j'ai réussi à éclairer un peu mes mots.
Mais dans le fond, ce n'est pas si délicat que ça. Tout reste une question de bon sens ;-)

@ Jacynthe : J'ai encore l'impression que ça pourrait être plus clair, mais si ça te va, ça me va :-)

Anonyme a dit…

J'aime vraiment beaucoup quand tu es dans la confession Caro... tu fais ça très bien...
Merci Odile, tu fais un joli portrait de moi!!!! (les liens familiaux sont trop forts!!!!)...
Gros bisous à toutes les deux!!!!

Caro D a dit…

;)
C'est que c'est plus facile avec des mots écrits. Parce que sinon, je parle, je parle, je brasse beaucoup d'air, mais j'en dis le moins possible, dans le fond ;-)

Anonyme a dit…

Tu as bien raison, si une amie était dans cette situation, je ne lui aurais certainement pas envoyer un "massive mail" pour lui annoncer ma bonne nouvelle.

Je trouve aussi étrange de demander aux gens qui nous accompagne de s'abstenir de manger quelque chose qui nous est interdit... le sucre est proscrit chez nous, vais-je empêcher toute ma table au resto de commander du dessert parce que nous on ne peut pas...

Je me retiens facilement ou je planifie lorsque mes enfants nous accompagne de sorte que je ne prive personne.

Si c'était quelqu'un de près de moi, c'est clair aussi que j'aurais été assez aimable pour ne pas lui en manger dans la face. Si c'était comme ta copine pas très délicate... hé bien je me serais fait un plaisir de déguster mes moules juste à côté d'elle! (c'est mon côté mesquin et pas très joli, mais bon je l'assume ;))

Caro D a dit…

;-)
Mon côté mesquin et pas très joli à moi m'aurait fait faire pareil ;-))))
Il y a parfois de petites vengeances bien innocentes qui font beaucoup de bien héhé !

Pour le reste, tu as trouvé le mot, les gens sont parfois étranges...

Anonyme a dit…

Il n'y a heureusement pas de frontières ou de côté à la souffrance et au bonheur, ce qui donne espoir que l'on puisse, d'un seul pas, se trouver là où on souhaite se trouver, que ce soit pour ce que l'on désire ou pour la sérénité que l'on trouve dans l'attente de l'obtenir. Lili, autrement, me fait toujours autant de bien... même si parfois c'est pour me libérer de kilos de larmes... grosse bise.

Caro D a dit…

Et si après les larmes on retrouve de l'espoir, alors au final, c'est déjà une belle partie de gagnée sur pas mal de choses.

Grosse bise à toi aussi cher Alcolo.